Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/487

Cette page n’a pas encore été corrigée

du Roy mon Frere. Je n’en ſuis pourtant pas encore là, je l’advouë aveques honte, pourſuivit elle, ſi bien que tout ce que je puis faire pour vous, eſt de connoiſtre ſeulement que je le dois. Je n’aurois jamais fait, Seigneur, ſi je vous rediſois tout ce que dit cette Princeſſe en cette rencontre : non plus que tout ce que penſa Spitridate au retour de ce Heraut qu’il avoit envoyé. Car comme il n’avoit oſé luy faire rien dire d’obligeant, de peur de ſe rendre ſuspect : il connut bien par ſa reſponse, qu’il s’eſtoit trompé, lors qu’il avoit creu que cette Princeſſe le devoit aſſez bien connoiſtre pour croire qu’il feignoit, lors qu’il agiſſoit avec elle comme un ennemy. Il eut pourtant quelque conſolation, d’aprendre que ceux qui eſtoient demeurez Chefs des Troupes d’Artane luy obeïſſoient : & de ce que c’eſtoit directement avec elle qu’il faloit traiter. De ſorte que changeant de ſentimens, il tint conſeil de guerre le lendemain : où il declara, qu’il ne trouvoit pas glorieux d’entreprendre de forcer une Ville, qui n’eſtoit deffenduë que par une Princeſſe : ſans avoir du moins fait tout ce qui ſeroit poſſible, pour l’obliger à ſe rendre, avant que d’en venir à la force. Si bien que pour eſpagner, diſoit il, les Troupes du Roy ſon Pere, & pour garder quelque bien-ſeance, avec une Grande Princeſſe ; il eſtoit reſolu de luy envoyer demander la grace de luy parler. La plus grande partie des Chefs, de qui Spitridate commençoit d’eſtre fort aimé, & principalement d’Intapherne, approuverent ſon advis : & il n’y eut preſques que ce Lieutenant General, dont je vous ay deſja parlé, qui s’y oppoſa. Bien eſt il vray que ce fut avec beaucoup de violence, comme nous l’avons sçeu depuis :