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ame capable d’eſcouter avec quelque plaiſir la juſtification de Cyrus. Car comme il ne faloit plus faire un ſecret ny de ſa naiſſance, ny de ſa paſſion, il leur eſtoit beaucoup pluſt aiſé qu’auparavant de luy faire voir ſon innocence. Chriſante avoüa alors avec ingenuité, de quelle nature eſtoit l’intelligence qu’avoit euë Cyrus avec le Roy d’Aſſirie : & luy fit ſi bien comprendre que cette intelligence n’avoit pas eſté criminelle, que le Roy luy meſme en ſoupira de douleur : voyant en quel eſtat ce pretendu crime l’avoit conduit. Marteſie de ſon coſté, juſtifiant auſſi ſa Maiſtresse, luy diſoit en peu de paroles, avec tant de ſincerité, comme la choſe s’eſtoit paſſée : que luy meſme ne trouvoit plus avoir ſujet de ſe pleindre. Il n’y avoit que ce Portrait qui avoit eſté trouvé dans la Caſſette de Cyrus, qui luy donnoit je ne sçay quelle idée d’une affection trop galante, pour une Princeſſe d’une auſſi grande vertu que Mandane. Car encore que Marteſie luy euſt dit qu’il avoit eſté fait pour la Princeſſe de Pterie, il n’en avoit point de preuve : mais par bonheur Marteſie s’eſtant ſouvenuë d’une choſe qui pouvoit entierement l’eſclaircir là deſſus : Seigneur, luy dit-elle, Ariobante, qui comme vous sçavez eſtoit frere de la Princeſſe de Pterie, pour qui ce Portrait avoit eſté fait, vous pourra aſſurer que je ne ments pas, & le pourra reconnoiſtre, ſi voſtre Majeſté le luy montre : car je me ſouviens qu’il eſtoit chez la Princeſſe le jour qu’il fut achevé : & que la Princeſſe ſa Sœur eſtant tombée malade le lendemain, elle envoya Ariobante pour le demander comme un remede à ſon mal. Mais le Peintre l’ayant voulu remporter, parce qu’il vouloir retoucher quelque choſe à l’habillement, elle ne pût la ſatisfaire ; & cette Princeſſe