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e Araminte comme à l’ordinaire : & elle s’eſt touſjours informée des voſtres, avec un extréme ſoing. Elle nous a rendu de plus, cent bons offices en ſecret : & juſques à ce qu’elle ait eſté enlevée par Artane, nous avons touſjours eu intelligence enſemble, meſme depuis la guerre que le Roy mon Pere a commencée contre le Roy de Pont, De plus lors que l’illuſtre Artamene vint en Bithinie, & que nous creuſmes que c’eſtoit vous qui eſtiez revenu, elle teſmoigna en avoir une extréme joye quand je le luy eſcrivis : & je sçeus qu’elle avoit auſſi eû une extréme douleur, lors qu’elle avoit apris que nous nous eſtions abuſées. Enfin, Seigneur, adjouſta t’elle, il faut que je confronte cette pretenduë Lettre de la Princeſſe Araminte, avec celles que j’en ay : en diſant cela elle ouvrit une Caſſette qui eſtoit ſur la Table de ſon Cabinet : & en prenant pluſieurs, elle ſe mit à les regarder attentivement. Mais à peine eut elle aporté quelque attention à les conſiderer, qu’elle vit beaucoup de difference en pluſieurs caracteres. Il eſt pourtant certain qu’à l’abord, tout le monde y auroit pû eſtre trompé ; mais perſonne ne l’y pouvoit eſtre, en regardant cette fauſſe Lettre aupres d’une veritable. Spitridate eut une ſi grande joye de pouvoir eſperer qu’il avoit eſté abuſé, qu’il y avoit plus d’un quart d’heure qu’il eſtoit perſuadé en ſecret que cette Lettre eſtoit une fourbe : qu’il faiſoit encore ſemblant d’en douter, afin de s’en faire aſſurer davantage par la Princeſſe Ariſtée : & d’avoir un pretexte de regarder plus long temps la grande difference qu’il y avoit de certaines Lettres aux autres. Mais comment, diſoit Spitridate, cela aura t’il pû eſtre ? Pharnace