Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/442

Cette page n’a pas encore été corrigée

ou de quelque autre façon : que ne fit on donc point pour le reprendre ! on redoubla les Gardes des Portes ; on mit des Soldats dans toutes les ruës ; on chercha dans toutes les Maiſons ſuspectes ; & on n’oublia rien de tout ce qu’on pouvoit faire, qui vray-ſemblablement deuſt ſervir à le trouver. Le Roy eut quelque leger ſoubçon que la Princeſſe avoit aidé à faire eſchaper Spitridate, & meſme il luy en dit quelque choſe : mais comme il n’en avoit nulle preuve, & que ce Prince n’avoit jamais sçeu l’obligation que m’avoit ce Capitaine de la Tour : parce que ç’avoit eſté par le moyen du Prince Sinneſis que j’avois obtenu la vie de ſon Fils du feu Roy ſon Pere, ces ſoubçons ſe diſſiperent aiſément. Cependant Spitridate eſtoit dans la Priſon, où l’on ne s’aviſa point d’aller chercher : & où il falut qu’il faſt quelque temps auparavant que d’oſer entre prendre de s’eſloigner. Comme le Capitaine de la Tour luy eut dit que c’eſtoit par ma negociation qu’il eſtoit en priſon ſans eſtre priſonnier, il s’imagina bien que la Princeſſe sçavoit la choſe : de ſorte qu’il me fit demander la grace de me voir auparavant qu’il partiſt, ce que je luy accorday ſans en parler à la Princeſſe : me ſemblant que je ne pouvois refuſer cette faveur, au Fils du veritable Roy de Bithinie. Mais apres luy avoir fait eſperer ce qu’il ſouhaitoit, la difficulté fut de l’executer : neantmoins comme la Femme du Capitaine de la Tour eſtoit de l’intelligence, je me reſolus d’y aller, avec une Fille ſeulement : & d’entrer par une petite porte deſrobée, qui donne vers les Ramparts de la Ville. De vous dire, Seigneur, avec quels teſmoignages de reconnoiſſance pour Araminte & pour moy, Spitridate me parla, il me ſeroit impoſſible : enfin Heſionide,