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vray, repliqua Artane, que je ſuis de voſtre ſentiment : & je trouve principalement que les Grands Rois ne doivent s’amuſer qu’à donner la chaſſe à leurs ennemis, & qu’à prendre des Royaumes : & que les belles Princeſſes auſſi (adjouſta t’il, avec une hardieſſe extréme) ne doivent ſonger qu’à prendre des cœurs. Mais je voudrois que ce ne fuſt pas comme à la Chaſſe, où l’on prend tout ce que l’on rencontre : & je ſouhaiterois que ce fuſt avec choix qu’elles agiſſent en ces occaſions. Si cela eſtoit, reprit la Princeſſe, il y en a peut eſtre beaucoup qui ſont pris qui ſeroient libres : Vous pourriez bien Madame ſe vous vouliez, luy repliqua t’il inſolemment, m’éclaircir de beaucoup de choſes à la fois ſur ce ſujet : car vous pourriez m’apprendre quel ſeroit le deſtin du Prince Spitridate, de Pharnace, & d’Artane, ſi cette eſpece de Chaſſe eſtoit en uſage. Il prononça ce dernier Nom ſe bas, que la Princeſſe penſa ne l’entendre point : touteſfois l’ayant entendu à demy, & voyant bien par le deſordre du viſage d’Artane qu’elle ne ſe trompoit point, elle luy reſpondit bruſquement de cette ſorte. Si le deſtin des trois Perſonnes que vous m’avez nommées, luy dit elle, deſpendoit de moy, il y en auroit aſſurément deux heureuſes : & la troiſiesme ? interrompit il ; & la troiſiesme, pourſuivit elle, auroit ce qu’elle merite ſans doute : c’eſt à dire beaucoup de part au mépris & à l’averſion de la Princeſſe Araminte. le ſuis donc bien aiſe, reſpondit il, que cette eſpece de Chaſſe ne ſoit point à la mode : & je ſuis bien marrie, dit elle, que vous l’ayez ſe mal inventée. Mais quoy qu’il en ſoit Artane…… Mais quoy qu’il en ſoit Madame, interrompit il, vous ne sçauriez faire que vous ne ſoyez eternellement