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d’obliger ceux qui luy faiſoient quel que priere. Aglatidas, qui n’eſtoit pas un de ceux qu’il conſideroit le moins, fut un matin le conjurer de vouloit demander pour Otane, le Gouvernement de la Province des Ariſantins, qui eſtoit vacant par la mort de celuy qui le poſſedoit. Pour Otane ! (luy dit Cyrus avec beaucoup d’eſtonnement) ouy Seigneur, adjouſta t’il, c’eſt pour Otane que je vous demande cette grace : ou pour mieux dire, c’eſt pour la belle Ameſtris. Car vous sçaurez que je ſuis adverti par Artabane qui me l’eſcrit, qu’un homme qui eſtoit ennemi mortel d’Artambare ſon Pere, a deſſein de l’obtenir de Ciaxare : c’eſt pourquoy, Seigneur, je vous ſupplie de vouloir empeſcher que l’incomparable Ameſtris, que l’on m’aſſure eſtre touſjours tres melancolique & tres ſolitaire, ne reçoive pas ce deſplaisir là. Car comme tout ſon bien eſt dans la Province des Ariſantins, ce luy ſeroit une faſcheuse avanture, que celle de voir l’ennemi de ſa Maiſon en eſtre Gouverneur. Vous avez raiſon, reſpondit Cyrus, mais ne ſeroit il pas plus juſte que je demandaſſe la choſe pour vous que pour Otane ? puis que de cette ſorte le Roy en ſeroit mieux ſervi, & les Terres d’Ameſtris n’en ſeroient pas moins protegées. Vous eſtes trop bon, repliqua Aglatidas, de me parler comme vous faites : neantmoins Seigneur, ſi vous voulez m’obliger, vous ne ſongerez jamais à faire rien pour un homme de qui l’ambition eſt ſurmontée par l’amour : & qui ne cherche plus que la mort, pour finir les peines qu’il ſouffre. C’eſt pourquoy ne pouvant accepter ce Gouvernement, je vous conjure encore une fois, de la demander pour Otane. Je le feray, luy dit Cyrus mais à condition que vous ferez qu’Ameſtris sçache que vous luy avez