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s’engager auſſi à un Siege, dans l’impatience où ils eſtoient de delivrer Mandane, eſtoit une choſe où ils avoient bien de la peine à ſe reſoudre. Neantmoins comme ils eſtoient bien advertis qu’il n’y avoit pas alors dans cette Place de Troupes aſſez conſiderables pour la garder, s’eſtant toutes diſſipées depuis le départ du Roy d’Aſſirie : & sçachant meſme que les deux mille hommes que Metrobate y avoit envoyé querir la derniere fois, s’eſtoient auſſi diſpersez en chemin ſans y retourner, dés qu’ils avoient sçeu que l’Armée de Ciaxare avoit emporté Sinope par eſcalade : ils reſolurent que Cyrus iroit avec une partie des Troupes pour la reprendre. Ils ne furent toutefois pas en cette peine là : car le lendemain au matin l’on eut nouvelle que les Habitans de Pterie ayant sçeu qu’Artamene eſtoit delivré & eſtoit Cyrus, avoient tramé ſecrettement entre eux, de retourner le pluſtost qu’ils pourroient, ſous l’obeïſſance de leur Prince legitime : & de prevenir le chaſtiment qu’ils meritoient, par un repentir genereux. De ſorte que s’y eſtans fortement reſolus, & ayant bien concerté la choſe : on sçeut qu’ils avoient tué Artaxe, & tous les Soldats de la Garniſon : qu’ils avoient repris le Chaſteau, & qu’ils s’eſtoient rendus Maiſtres de leur Ville, dont ils envoyoient les Clefs à Cyrus par ſix de leurs principaux Habitans, afin qu’il les preſentast au Roy. Cette nouvelle réjoüit extrémement ces deux Princes, qui reçeurent avec beaucoup de bonté ces Rebelles repentans : leur pardonnant auſſi genereuſement, que genereuſement ils avoient executé leur entrepriſe. On ne ſongea donc plus qu’à baſtir la marche de l’Armée pour l’Armenie : & en effet, apres avoir fait une Reveuë generale de toutes les