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temps) fit un deſſein d’aller faire une promenade ſur la Mer : ou pluſtost une belle Peſche, où toutes les Dames ſe devoient trouver. La Princeſſe Herſilée les en convia toutes : & quoy que la feſte fuſt ſans doute faite pour la belle Meneclide ; je creus neantmoins qu’elle eſtoit pour Alcidamie : avec qui elle avoit une amitié tres particuliere en ce temps là. Car depuis l’avanture du Portrait, Acaſte qui avoit eſté autrefois ſa principale Amie, ne l’eſtoit plus tant : & Meneclide avoit la premiere place dans ſon cœur. Toutes choſes eſtant donc preparées pour cette Peſche, & le jour en eſtant pris, on fut contraint de la differer : parce qu’il arriva un ambaſſadeur d’Amaſis Roy d’Egipte qui aimant fort Polycrate, luy envoyoit dire que ſa bonne fortune luy donnoit de l’inquietude : & qu’un tres sçavant homme luy ayant aſſuré qu’il eſtoit impoſſible qu’il peuſt touſjours eſtre heureux : il luy conſeilloit de ſe preparer au malheur, par quelque perte volontaire : afin que s’il luy devoit arriver quelque choſe de faſcheux, ſon ame n’en fuſt pas ſi ſurprise. Polycrate reçeut cét avis avec beaucoup de teſmoignages de reconnoiſſance, des ſoins qu’un ſi grand Roy prenoit de luy : je n’en uſa pourtant pas comme on l’a publié en Aſie : car j’ay sçeu que l’on a dit qu’il monta ſur une Galere avec cét Ambaſſadeur d’Egipte : & qu’eſtant bien avant dans la Mer, il y jetta de deſſein premedité un Cachet d’un prix ineſtimable : afin de ſe cauſer à luy meſme un ſujet d’affliction. Mais la choſe n’alla pas ainſi : & voicy poſitivement, ce qui a donné fondement à cette nouvelle, qui s’eſt eſpanduë, non ſeulement en Aſie, mais par tout le Monde. Le lendemain que cét Ambaſſadeur fut arrivé, & qu’on