Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/323

Cette page n’a pas encore été corrigée

de qualité, que cette grande nouvelle attiroit chez le Roy : tout le monde voulant ſe reſjoüir aveque luy, d’une choſe qui effectivement meritoit bien de cauſer une alegreſſe publique. Le Nom de Mandane eſtoit en la bouche de tout le monde : Ceux qui la connoiſſoient, racontoient à ceux qui la connoiſſoient pas, les rares qualitez de cette Princeſſe. Ainſi comme la douleur de ſa perte, avoit fait faire ſon éloge, la certitude de ſa vie, faiſoit redire ſes louanges. Ce n’eſt pas qu’apres ces premiers momens de ſatisfaction, Ciaxare n’euſt du deſplaisir, de ne sçavoir point bien preciſément, qu’elle eſtoit l’advanture de la Princeſſe ; ny qui la menoit ; ny pourquoy on la menoit en Armenie. Il sçavoit bien que le Roy de ce Païs la eſtoit ſon Tributaire : & que le Prince Tigrane ſon Fils eſtoit brave & genereux, & aimoit extrémement Artamene : mais il sçavoit auſſi que ce vieux Roy eſtoit capricieux : & qu’il n’avoit point envoyé de Troupes en ſon Armée, comme il y eſtoit obligé. Ciaxare donc, ne gouſtoit pas cette joye toute pure : neantmoins comme il voulut en teſmoigner quelque inquietude ; Seigneur, luy dit le Roy d’Hircanie, que la captivité de la Princeſſe Mandane ne vous inquiete pas : car enfin pour rompre ſa priſon, quelque ſorte qu’elle puiſſe eſtre ; vous n’avez qu’à faire ouvrir les portes de celle d’Artamene : & qu’à le mettre à la teſte de tant de Rois & de tant de Princes qui m’eſcoutent : Et ſoyez aſſuré Seigneur, que s’il eſt noſtre Guide, nous le ſuivrons en Armenie, & nous y ferons ſuivre par la Victoire. Quand nous aurons rendu graces aux Dieux, repliqua le Roy des Medes, nous verrons ce qu’ils nous inſpireront là deſſus :