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de me commander quelque choſe pour voſtre ſervice de vous parler ſincerement : je vous diray que ſelon mon ſens, une des choſes qui porte le plus le Prince à proteger Adraſte, eſt qu’il hait Arteſilas : & qu’il ne croit pas luy pouvoir cauſer un plus ſensible déplaiſir, que celuy de faire en ſorte que vous luy preferiez ce Prince Phrigien. C’eſt pourquoy, Madame (ſi ce n’eſt point perdre le reſpect : que je vous dois que de parler en ces termes) c’eſt à vous à regarder, ſi durant que j’agiray avec le Prince, vous pourrez auſſi agir avec Arteſilas de la façon qu’il faut, pour faire que ce ne me ſoit pas un obſtacle à obtenir ce que vous ſouhaitez. Je vous ay deſja dit, repliqua la Princeſſe, que mon ame n’a aucun engagement : ſi bien qu’encore que je n’aye pas une auſſi forte averſion pour Arteſilas que pour Adraſte : comme j’ay du moins beaucoup d’indifference pour luy, il me ſera fort aiſé de contenter le Prince mon Frere en cette occaſion : & pourveu qu’il me laiſſe la liberté de mal traiter Adraſte, Arteſilas n’aura pas grand ſujet de ſe louer de moy. Cleandre entendant parler la Princeſſe de cette ſorte, en fut ſi tranſporté de plaiſir, que je m’étonne qu’elle ne connut ſon amour, par la joye qui parut dans ſes yeux : il eſt vray qu’elle n’y fut pas longtemps ; car venant à penſer que la Princeſſe ne ſoupçonnoit rien de ſa paſſion : & que ſelon les aparences, il n’obtiendroit pas du Prince de Lydie ce qu’elle en ſouhaitoit : la melancolie ſucceda à cette joye. Neantmoins la certitude qu’il venoit d’avoir, que ſes Rivaux n’eſtoient point aimez, eſtoit pour luy une cauſe ſi eſſentielle de ſatisfaction, que la joye l’emporta enfin ſur la douleur : & : il partit