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n’ayant pas meſme le temps de raiſonner ſi elle la luy devoit confier. Palmis qui ne cherchoit qu’à obliger Mandane, ayant prié Andramite de faire arreſter ſon Chariot, & ce Lieutenant General n’ayant pas manqué de luy obeïr : elle ſe mit à le conjurer de vouloir luy faire la grace, de luy donner un cavalier que Mandane venoit de voir parmy les priſonniers que l’on avoit faits : Madame, luy dit-il, vous sçavez bien que je ne le dois pas : je sçay, luy dit-elle, qu’à obſerver les ordres de la guerre exactement, vous eſtes obligé de me refuſer, mais je sçay auſſi qu’eſtant ce que je ſuis vous devez m’accorder tout ce qui ne peut pas nuire au Roy : & vous sçavez bien, Andramite, qu’un cavalier de plus ou de moins, ne fait pas gagner, ou perdre une Bataille. Quoy qu’il en ſoit, dit-elle, je vous le demande : & je m’engage à vous en faire recompenſer par le Prince Myrſile, puis qu’en l’eſtat ou je ſuis preſentement, je ne le sçaurois faire par moy meſme. Durant que cette Princeſſe parloit à Andramite, Mandane penchant languiſſamment la teſte de l’autre coſté, taſchoit de voir encore l’illuſtre Cyrus : qui s’eſtant avancé de quelques pas, la voyoit & luy donnoit moyen de le voir. Le Roy d’Aſſirie avoit beau s’empreſſer, il ne pouvoit rencontrer les yeux de Mandane : de ſorte que ne pouvant ny bien voir ce qu’il aimoit, ny s’en aprocher, il faiſoit du moins ce qu’il pouvoit pour deſtourner ſon Rival : tantoſt en luy diſant quelque choſe ; & tantoſt en ſe mettant devant luy, faiſant ſemblant de n’y ſonger pas. Cependant la Princeſſe Palmis, ſolicitée par Mandane, preſſa ſi inſtamment Andramite de donner la liberté à ce cavalier, que