Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/617

Cette page n’a pas encore été corrigée

de luy, il n’oſoit l’y faire aller de peur de ſe rendre ſuspect luy meſme. De ſorte que prenant la reſolution de le faire porter en un autre lieu plus prés de Sardis ; & ſe reſolvant auſſi à continuer ſa marche, aprenant qu’il m’y avoit aucun, danger : il commanda en effet que les Troupes commençaſſent de marcher, ce qu’elles firent : Andramite attendant à donner les ordres neceſſaires pour faire porter Artamas, qu’il paſſast au lieu ou il eſtoit, & qu’il sçeuſt du Chirurgien qui auroit viſité ſes bleſſures, s’il ſeroit : en effet en eſtat d’eſtre tranſporté plus loing.

Toutes les Troupes commençant donc d’avancer ces priſonniers eſtant encore là, parce qu’il falloit leur donner des chevaux, les leurs ayant eſté ou tüez, ou pris par des ſoldats qui ne paroiſſoient plus : ils virent apres pluſieurs Troupes qu’Andramite regardoit filer, paroiſtre pluſieurs Chariots, où ils entre-virent de loin des Femmes. Cette veuë fit battre le cœur à Cyrus & au Roy d’Aſſirie ; ſi bien que s’advançant nous deux à la fois, juſques au bord du chemin où ces Chariots devoient paſſer ; ils virent que dés que le premier aprocha, Andramite fut au devant : & que marchant à la portiere, qui n’eſtoit pas du coſté de Cyrus, il parloit avec beaucoup de reſpect à celles qui eſtoient de dans Mais lors que ce chariot, qui alloit fort lentement, fut vis à vis de Cyrus & du Roy d’Aſſirie, & qu’ils virent que Mandane y eſtoit, que ne ſentirent-ils point ! leur ame en fut ſi troublée ; leur cœur en fut ſi eſmeu, qu’ils penfetent ſe deſcouvrir pour ce qu’ils eſtoient : & ſi la honte de paroiſtre devant Mandane, en un (eſtat ſi indigne d’eux, ne les euſt retenus, ils euſſent aſſurément arreſté