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montant donc à cheval en diligence : & obeïſſant à ſon maiſtre, fut dans ce Bois pour y chercher Cyrus : mais ſoit que la frayeur l’euſt ſaisi, ou qu’il n’en sçeuſt pas bien les routes, au lieu d’aller où. Aparemment il le devoit trouver, il s’engagea dans un chemin qui l’en eſloigna ſi ſoit, qu’en effet il ne le trouva point. Si bien que ce Prince ſuivy de tous ceux qui l’accompagnoient, ſans sçavoir rien de ce qui ſe paſſoit, apres avoir reſolu tout ce qu’il avoit à reſoudre, & avoir fait conſentir le Roy d’Aſſirie à ce que le Prince Artamas avoit propoſé ; commença de reprendre le chemin qui le pouvoit conduire dans la Plaine, & de là au Chaſteau d’Hermes. Mais il fut eſtrangement ſurpris, lors qu’apres avoir preſque traverſé tout le Bois, il commença d’entendre ce bruit ſourd que font les pieds des chevaux d’un gros de cavalerie qui marche : de ſorte que ſuivant le mouvement de ſon grand cœur, au lieu de s’arreſter comme il euſt peut-eſtre eſté à propos, il s’advança devant les autres : & ne fut pas pluſtost au bord de la Plaine, qu’il vit un Eſcadron de cavalerie, à cinquante pas de luy : & en meſme temps il vit des gens de guerre vis à vis du Pont du Chaſteau d’Hermes, & toute la Campagne couverte de divers corps de cavalerie & d’Infanterie. Cette ame intrepide ne pût touteſfois s’eſbranler, à la veuë d’un objet ſi ſurprenant, & d’un peril ſi ineſvitable : ſi bien qu’au lieu de ſe renfoncer dans le Bois en diligence, & de fuïr, la premiere action de Cyrus fut de s’arreſter ; la ſeconde de tourner la teſte, pour regarder s’il eſtoit ſuivy : & je ne sçay ſi la troiſiesme n’euſt pas eſté de s’avancer pour aller chercher la mort en deſesperé, ſi tout d’une voix le Prince Artamas,