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d’amour, au deſir d’aquerir une nouvelle, gloire, renverſera ſelon toutes les apparences, toute la Grandeur de Creſus ; principalement ne delivrant pas l’illuſtre Cleandre. Voila, Madame, luy dit-il, la cauſe de ma melancolie, & ce que vous appeliez tiedeur & deffaut d’amour. Mais pour eſprouver ma paſſion, & ne vous fier pas a mes paroles, commandez-moy les choſes du monde les plus difficiles : & ſi je ne vous obeïs, croyez que je n’ay plus que de l’amitié pour vous, & n’ayez plus que de la haine pour moy. Ligdamis prononça ces paroles, d’une maniere ſi eſloignée de la tiedeur dont Cleonice l’avoit accuſé, que je la condamnay à luy en demander par don, devant qu’elle euſt loiſir de parler : & en effet apres qu’elle eut encore un peu reſisté, elle luy fit des excuſes de la croyance qu’elle avoit eue de luy : en paroiſſant meſme ſi honteuſe, qu’elle ne vouloit plus qu’il luy diſt rien pour s’en juſtifier davantage. En fuite dequoy, nous partageaſmes la melancolie de Ligdamis : & trouvaſmes qu’il avoit grande raiſon de craindre ce qu’il craignoit. Depuis cela, Madame, ces deux perſonnes n’eurent plus de querelle enſemble : mais ils ne furent pourtant pas ſans affliction : car Ligdamis tomba malade peu de jours apres, & ſi dangereuſement, qu’on creut qu’il mourroit. Mais à la fin les Medecins reſpondant de ſa vie, dirent qu’il ſeroit tres long temps à guerir : & en effet il a touſjours eſté tres mal juſques à ce que l’on ait delivré Cleandre. Cleonice eut auſſi une fiévre tres violente, qui fut cauſe qu’elle ne pût regagner Epheſe, lors que les Troupes de Cyrus s’a procherent de la Lydie. Pour moy je ne la voulus pas quitter : & comme la maiſon de la sœur de Ligdamis eſtoit