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importante devoit leur inſpirer. Comme Cyrus y avoit eſté le premier, il avoit eu loiſir de dire à la Princeſſe Araminte, qu’il luy engageoit ſon honneur, qu’elle pouvoit aſſurer le Roy de Pont, qu’il ſe ſouvenoit encore de toutes les obligations qu’il luy avoit : & qu’il luy promettoit de luy redonner une Couronne, s’il vouloit rendre Mandane. De plus, ce Prince par certaines paroles adroites, fit ſi bien comprendre à cette Princeſſe qu’elle l’engageroit encore plus fortement à eſtre le protecteur de Spitridate, ſi elle agiſſoit bien en cette occaſion ; que comme elle l’entendit d’abord, elle interrompit Cyrus : & l’arreſtant par ce diſcours, Seigneur, luy dit-elle, ne confondez point s’il vous plaiſt mon intereſt avec le voſtre : & laiſſez moy du moins la gloire de n’avoir regardé que celuy de l’illuſtre Cyrus, & celuy du Roy mon Frere en cette rencontre. Ce Prince alloit luy répondre, lors que le Roy d’Aſſirie entra dans la Chambre d’Araminte : & joignant ſes prieres à celles de ſon Rival, il la conjura par d’autres raiſons de faire la meſme choſe. Ces deux Princes la furent conduire juſques à deux cens ſtades du Camp, apres qu’elle eut eſté dire adieu à la Reine de la Suſiane ; qui ne la vit pas partir ſans douleur, quoy que cette abſence ne deuſt pas eſtre longue. Le Roy de Pont qui eſtoit adverty du jour de cette entreveuë, partit auſſi d’Epheſe, & ſe rendit à ce Temple, ſuivant ce qui avoit eſté arreſté entre luy & Aduſius : & il y arriva meſme deux heures devant la Princeſſe ſa Sœur. Comme ils ne s’eſtoient point veus depuis la perte de ſes Eſtats, cette entre-veue de part & d’autre, renouvella dans leur eſprit, le ſouvenir de toutes leurs infortunes. Lors que la Princeſſe Araminte arriva,