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de Phrigie arriva : à qui la Princeſſe Araminte teſmoigna la joye qu’elle avoit d’avoir apris qu’il avoit un Fils ſi illuſtre : & repaſſant alors les plus conſiderables evenemens de ſa vie ; ils ne pouvoient aſſez admirer la merveilleuſe conduite des Dieux en toutes choſes. Pour moy, diſoit le Roy de Phrigie, toutes les fois que je me ſouviens de la ſorte repugnance que j’avois à la guerre que je faiſois contre Creſus, je ne puis pas douter que les Dieux ne m’advertiſſent que je ne la devois pas faire : cependant, adjouſtoit-il, ſi je puis avoir la joye de voir que mon Fils rende la Princeſſe Mandane à l’illuſtre Cyrus, je ne demande plus rien aux Dieux. Ce bonheur eſt trop grand, interrompit ce Prince en ſouspirant, & quoy que je face, je ne le puis preſque eſperer. Vous le devez pourtant, repliqua la Princeſſe Araminte, puis que de la façon dont Soſicle a raconté la choſe, elle paroiſt indubitable. Quand je fus à Sinope, reprit Cyrus, qui m’euſt dit que je ne delivrerois pas Mandane, je ne l’euſſe pas creu : & quand nous priſmes Babilone, je n’aurois pas non plus penſé qu’elle en euſt pu ſortir. Enfin apres s’eſtre encore entretenus quelque temps de cette ſorte, comme il eſtoit deſja tard, Cyrus prit congé de la Princeſſe Araminte : & s’en retourna au Camp, ſuivi du Roy de Phrigie, l’eſprit partagé de crainte & d’eſperance, & abſolument occupé par ſa chere Princeſſe : ordonnant touteſfois auparavant à Araſpe, de faire sçavoir à la Reine de la Suſiane, qu’il eſtoit bien marri de ſon mal : & luy commandant tout de nouveau d’en avoir tout le ſoing imaginable.