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Mandane, envoya ſolliciter ces deux Rois qui eſtoient ſes Alliez, d’entrer dans ſon Parti : ce qu’ils firent l’un & l’autre par Politique, faiſant une Treſve entre eux, pendant qu’ils iroient ſecourir le Roy d’Aſſirie, & s’oppoſer à la puiſſance des Medes qu’ils redoutoient, ou pluſtost à la valeur de l’illuſtre Cyrus ſous le nom d’Artamene ; ſi redoutable par toute l’Aſie. Le Roy de Phrigie demanda touteſfois malgré la Treſve, que ſes Troupes ne fuſſent pas meſlées aux Troupes Lydiennes : Enfin, Madame, vous sçavez trop bien tout ce qui s’eſt paſſé en Aſie depuis ce temps là, pour vous en entretenir : joint que Cleandre n’y ayant aucune part, puis qu’il a touſjours eſté en priſon, je n’ay rien à vous en dire. Car apres la premiere deffaite du Roy d’Aſſirie, Creſus ayant eu quelque meſcontentement de luy, ſe retira, & retourna à Sardis, ſans changer rien ny à noſtre priſon, ny à celle de la Princeſſe. Cependant Arteſilas n’eſtoit pas non plus trop heureux ; puis que ne pouvant faire abſolument perir ſon Rival, ny voir ſa Maiſtresse, on peut dire qu’il s’eſtoit puny luy meſme d’une partie de ſes crimes. Pour Cleandre, comme il eſt ſoit aimable, il ſe fit aimer de ſes Gardes : & juſques au point qu’ils luy laiſſoient la liberté d’eſcrire & de recevoir des Lettres, malgré les deffences de Pactias : de ſorte qu’il eſcrivit à Eſope, afin qu’il luy donnaſt moyen de pouvoir donner de ſes nouvelles à la Princeſſe, ce qu’Eſope luy accorda ſans que j’aye pû deſcouvrir encore par quelle voye il le pût faire. Cependant Cleandre, Thimettes, Timocreon, Acrate, & moy, vivions dans une melancolie eſtrange ; & nous veſcusmes touſjours ainſi, juſques à ce que Creſus eſtant en inquietude d’aprendre