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de plus, qu’il n’alloit pas ſe jetter dans le Parti de voſtre ennemi pour vous combattre. Vous en sçavez trop, luy dit Creſus en l’interrompant : & quand vous n’auriez point fait d’autre crime, que celuy d’eſtre informée ſi particulierement, à ce que vous dites, des penſées les plus ſecrettes d’un homme comme Cleandre, inconnu & criminel ; vous ſeriez aſſez coupable pour eſtre indigne de pardon. Mais Seigneur, luy dit-elle, puis que je ne puis me juſtifier envers vous, qu’en juſtifiant Cleandre, & qu’en vous faiſant voir ſa veritable condition : pourquoy ne voulez vous pas vous en donner à vous meſme la patience ? Quoy, luy dit-il, vous voulez que je croye à vos paroles, parce que vous avez peut eſtre creû à celles de Cleandre, avec beaucoup de legereté ! Encore ne sçay je, adjouſta t’il, ſi vous n’eſtes point complice de cette impoſture groſſiere, qui fait qu’il ſe dit Fils de Roy, juſtement lors qu’il eſt accuſé d’un crime qui met ſa vie en danger. Enfin où. Font toutes ces marques convainquantes ? Vous dites les avoir veues, mais vous ne les pouvez faire voir : car pour ce Tableau que toute la Cour a veû, & que j’ay veû comme les autres, cela ne conclut rien, non plus que toutes ces autres choſes, à la reſerve de la Lettre du Roy de Phrigie. Pour celle là, j’advoüe que comme je connois ſon caractere, elle auroit eſté de quelque conſideration. mais on s’eſt contenté de vous la monſtrer, à vous qui ne la pouviez connoiſtre ; & on ne me l’a pas monſtrée à moy, parce que l’en aurois deſcouvert la fauſſeté. En un mot, Cleandre eſt un inconnu ; vous ne l’avez deû regarder que comme tel ; vous n’avez pas meſme deû croire que je vous deuſſe commander de l’eſpouser, que je ne vous l’euſſe