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la voix d’une Femme, & qui n’eſtoit pas de ceux qui eſtoient gagnez, en fut advertir le gouverneur ; qui ſe louant auſſi toſt, fit mettre tous ſes gens en armes ; ut à la Chambre de Cleandre ; fit ouvrir la porte de ce Pont ; & fit ſortir quelques uns de ſes Soldats, pour s’éclaircir de ce qu’on luy avoit dit. Tegée s’y voulut oppoſer, mais il n’eſtoit pas le plus fort ; & ſon Pere le fit prendre luy meſme. Cependant Cyleniſe & ſa Compagne oyant ce bruit, & entendant ouvrir la porte, voulurent fuir, & regagner celle du jardin, mais il leur fut impoſſible : & Cleandre voyant prendre une Fille de la Princeſſe devant luy, & pour l’amour de luy, ſans la pouvoir ſecourir, diſoit & faiſoit des choſes capables de deſcouvrir ce qu’il avoit ſi long temps caché. Comme Cyleniſe vit venir ces Soldats à elle, & qu’il n’y avoit point de moyen d’échaper, elle fit tourner le reſſort de la Lampe, & ſe faiſant connoiſtre à eux, ils en furent ſi ſurpris, qu’ils changerent leur violence en civilité : n’y ayant pas un de ces Soldats qui ne l’euſt veuë cent fois aupres de la. Princeſſe, quand elle alloit ſe promener à la Citadelle. Cette Fille qui a ſans doute beaucoup d’eſprit, leur dit que le danger où j’eſtois pour l’amour de Cleandre, eſtant la cauſe de ce qu’elle faiſoit, on ne devoit pas trouver eſtrange qu’elle vouluſt ſauver la vie à un de ſes Parents ; en concertant avec celuy qui l’avoit mis en peine, par quelle voye on pourroit faire connoiſtre ſon innocence. Ces Soldats l’eſcouterent paiſiblement, & meſme ils ne la contredirent point : touteſfois ils la menerent avec ſa compagne au gouverneur de la Citadelle, qu’elle voulut perſuader de la rendre à la Princeſſe, ſans faire sçavoir au Roy