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La choſe eſtant donc ainſi reſoluë, elle fut retrouver la Princeſſe, pour luy dire ce qu’elle avoit fait : mais voyant ce deſſein ſi avancé, elle penſa s’en repentir. Touteſfois le peril ou elle voyoit Cleandre ; la penſée qu’elle eut que quand elle voudroit apres luy faire sçavoir ſes intentions, elle ne le pourroit peut eſtre plus, puis que l’ordre de la garde que faiſoit Tegée pouvoit changer, firent qu’elle ſe reſolut enfin d’envoyer Cyleniſe aprendre à Cleandre ce qu’elle avoit deſſein de faire pour luy, afin qu’il ne la contrediſt pas. Mais quand elle vint à conſiderer, que Cyleniſe ne pouvoit pas aller ſeule en ce lieu là, elle changea preſques de ſentiment ; parce qu’elle ne pouvoit ſe reſoudre à ſe confier à pas une autre de ſes Filles. Enfin apres avoir bien cherché ; Mais Madame, luy dit Cyleniſe, la crainte & la recompenſe font que l’on peut aiſément trouver des gens fidelles : c’eſt pourquoy ſouffrez que je gagne une de mes Compagnes, & que je ſuborne auſſi le Portier des jardins, du coſté de la Citadelle ; afin qu’apres nous eſtre promenées aſſez tard elle & moy, nous allions avec cette Lampe que Tegée me doit envoyer, par cette grande Allée de Cyprès, qui donne juſques à la Porte qui eſt vis à vis du bout de ce Pont ſur lequel je dois parler à Cleandre. Ha Cyleniſe, s’écria la Princeſſe, que voſtre expedient eſt faſcheux ? Il n’y en a pourtant point d’autre Madame, reprit — elle, ſi vous ne voulez eſcrire, & : confier voſtre Lettre à Tegée : il me ſemble touteſfois qu’eſtant Parente de Soſicle, il y a moins de danger que je parle à Cleandre ; qu’il n’y en a que vous luy écriviez. La Princeſſe s’affligea alors extrémement & ſans pouvoir ſe reſoudre