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creût en effet qu’il luy importoit beaucoup que Cleandre ſe repentant de ſon crime, vouluſt le luy confeſſer : luy envoya Menecée, s’imaginant qu’il luy diroit encore plus franchement qu’à un autre, toutes les particularitez de ſon deſſein. Comme Menecée avoit touſjours fort aimé Cleandre, & que malgré toutes les apparences dont Arteſilas & ſon Amy coloroient la choſe, il ne croyoit point qu’il fuſt coupable, il luy fut aiſé de luy perſuader ſon innocence, & de luy faire croire la verité. Il la luy dit donc telle qu’elle eſtoit, en luy deſcouvrant ſa veritable naiſſance : & luy aprenant toutes les marques qu’il en avoit, ſans luy dire rien de la Princeſſe. Et comme Menecée luy demanda qui avoit ce petit Tableau, ces Tablettes, & toutes les autres choſes qui pouvoient juſtifier ce qu’il diſoit ; il luy a prit qu’il faloit le demander à Timocreon, qui en avoit touſjours eu le ſoing. Apres cela, Menecée fut retrouver Creſus, & luy dit tout ce que Cleandre luy avoit raconté : mais comme ce Prince avoit l’eſprit preoccupé, il n’adjouſta pas beaucoup de foy aux paroles de Cleandre. Neantmoins à la ſolicitation de Menecée il luy ordonna de voir Timocreon ; afin d’avoir principalement les Tablettes dont il luy parloit : parce qu’il avoit veû autrefois deux Lettres eſcrites de la main du Roy de Phrigie, & que de cette ſorte s’il y avoit de ! a verité à ce qu’on luy diſoit, il pourroit reconnoiſtre cette eſcriture. Menecée fut donc trouver Timocreon, qui fut alors contraint de luy confier que la Princeſſe sçavoit quelque choſe du deſſein de Cleandre : car croyant que celuy à. qui il avoit : commandé de porter à cette Princeſſe tout ce qu’il luy avoit donné en garde n’y auroit pas manqué : il fut forcé pour pouvoir juſtifier la naiſſance de Cleandre à Creſus,