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cela eſt : puis que je n’ay ſouhaitté de l’eſtre, que pour obtenir cét honneur. Non, luy dit la Princeſſe, la choſe n’eſt plus en ces termes : & quand on pourroit trouver les voyes de vous empeſcher d’aller combattre le Roy voſtre Pere ; on ne pourroit pas trouver celles de cacher voſtre illuſtre naiſſance : & Thimettes, Timocreon, Soſicle, & Acrate, ne voudroient pas garder un ſecret qui vous oſteroit une Couronne : joint que je ne le voudrois pas moy meſme. Mais ce qui m’a obligée a vous dire cela, eſt pour vous faire voir que vous vous découvririez inutilement au Roy mon Pere : car j’ay sçeu ce matin par la meſme perſonne qui m’avoit donné ce premier advis : que divers Princes Eſtrangers ont fait preſſentir de luy, s’il voudroit me marier : & qu’il a répondu qu’il eſtoit abſolument reſolu de ne me donner qu’à un homme qui comme je l’ay déja dit, aide un jour à regner au Prince mon Frere. Quoy Madame, s’écria Cleandre, la qualité de Fils de Roy que j’ay tant ſouhaittée ; principalement parce que je croyois qu’elle eſtoit abſolument neceſſaire à obtenir un bon-heur que je n’oſois eſperer, fera donc un obſtacle invincible à ma felicité ! Ha Madame, encore une fois, ſi cela eſt, je ne veux point de Couronne : & j’aime beaucoup mieux n’eſtre que Cleandre, que d’eſtre le Prince Artamas. Je ne vous dis pas ſi preciſément, luy repliqua-t’elle, que cét obſtacle ſoit invincible : mais je vous dis qu’il eſt grand. De plus, adjouſta-t’elle, s’il m’eſt permis de vous découvrir ma foibleſſe, il faut que je vous confeſſe encore, qu’il ne me ſeroit pas aiſé de me reſoudre à épouſer un homme que toute l’Aſie croiroit d’une naiſſance mediocre : c’eſt pourquoy agiſſons comme