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Si bien, Seigneur, reprit Thimettes, qu’il ne me reſte plus qu’à vous prier, de me faire la grace de me faire voir les Tablettes dans leſquelles cette Princeſſe eſcrivit : car j’ay sçeu chez la Princeſſe de Lydie que Timocreon les a encore. Cleandre eſtoit ſi ſurpris, d’entendre tout ce que Thimettes luy racontoit, qu’il ne pût preſques luy reſpondre : neantmoins à la fin ayant envoyé querir mon Pere, & luy ayant mandé qu’il apportaſt les Tablettes que l’eſclave müette luy avoit autrefois données ; il vint à l’inſtant, & les donna à Cleandre, qui les bailla à Thimettes. Mais il ne les vit pas pluſtost, que s’eſcriant en frapant des mains ; Ha Seigneur, luy dit il, je n’ay que faire de les ouvrir, pour connoiſtre qu’elles ont eſté à la Princeſſe Elſimene : car je connois aſſez les fermoirs que j’y voy. En diſant cela il les ouvrit ; & y liſant ces paroles, cét Enfant eſt recommandé au Dieu que l’on adore à Delos, il s’écria une ſeconde fois, n’en doutez point, Seigneur, n’en doutez point, vous eſtes Fils du Roy de Phrigie : & ces caracteres font ſi veritablement de la main de la Princeſſe Elſimene, qu’il n’y a rien au monde de plus certain, puis que je connois non ſeulement ſon écriture, mais ſon orthographe : car je penſe avoir porté cent Lettres de cette Princeſſe au Roy voſtre Pere, qui avoit meſme la bonté de me les monſtrer tres ſouvent, pour avoir le plaiſir de me voir admirer l’eſprit d’Elſimene, qui écrivoit ſi bien en une Langue eſtrangere. De plus, Seigneur, je vay peut eſtre vous faire voir une choſe bien ſurprenante : vous sçaurez donc, que quelque temps auparavant que de l’eſpouser, comme il voulut luy en donner par eſcrit les premieres aſſurances ; il ſe ſervit pour luy eſcrire plus ſeurement