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pour la conduire : & qu’eſtant deſja aſſez loing du Rivage (ſur lequel la Femme de ce Peſcheur eſtoit, qui avoit meſme perſuadé à ſon Mary de mener cette Femme & cét Enfant) ce vieux Marinier voulant racommoder quelque choſe au Gouvernail, eſtoit tombé dans la Mer, & s’eſtoit noyé, à cauſe qu’il eſtoit trop vieux & trop foible pour pouvoir nager. De ſorte que cette Bar que s’en eſtoit allée au gré des vents & des vagues : qui repouſſerent le corps de ce pauvre Peſcheur à terre. Acrate raconte encore, que lors que ſes Compagnons revinrent à cette maiſon, & qu’ils n’y trouverent plus l’Enfant ny l’eſclave, ils penſerent le ſoupçonner d’avoir ſervi à cette fuitte : mais il dit qu’il ſe déguiſa ſi bien, qu’ils changerent enfin d’avis. Joint que ſe flattant dans leur crime, ils creurent que cét Enfant auroit peri dans cette Barque ſans conduite : de ſorte qu’apres cela ils partagerent les Threſors qu’ils avoient : mandant au Prince Tydée, que la Mere & l’Enfant eſtoient morts : en fuite dequoy ſe ſeparant, chacun prit une route differente. Pour Acrate, il vint à Sardis, où il dit qu’il a toujours mené une vie fort inquiete & fort ſolitaire malgré ſa richeſſe : il adjouſte encore, que depuis le combat d’Arteſilas & de vous, ayant fort oüy parler de voſtre obſcure naiſſance ; & ayant entendu dire de quelle façon Timocreon vous avoit trouvé : il n’avoit point douté que vous ne fuſſiez Fils du Roy de Phrigie : mais il dit qu’il n’avoit pu ſe reſoudre d’abord, à vous confeſſer ſon crime. Que toutefois m’ayant veû ; il ne luy avoit pas eſté poſſible de s’empeſcher de me le deſcouvrir : afin de redonner un ſuccesseur au Roy de Phrigie, qui n’en a plus de ſa maiſon.