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le Prince Tydée, & comme ſon Rival, & comme un ambitieux, de luy avoir voulu oſter en un meſme jour, un ſuccesseur & une perſonne qu’il aimoit auſſi bien que luy : mais n’ayant aucunes preuves contre ce Prince qui n’avoit point party de la Cour, non pas meſme ſeulement aucunes conjectures effectives : il n’y eut pas moyen de trouver les voyes de l’accuſer. Ce Prince feignit meſme d’eſtre fort touché de cette perte : & le Roy votre Pere fut enfin contraint de ſouffrir ſon malheur, ſans avoir eu la conſolation de sçavoir de qui il ſe devoit vanger, ny ſeulement de qui il ſe devoit pleindre. Depuis cela, il a continuellement fait rechercher, & continuellement regretté ſa chere Elſimene, n’ayant jamais voulu écouter ceux qui luy ont propoſé de prendre une ſeconde Femme : & n’ayant eu autre conſolation, que celle de conſerver ſoigneusement le Portrait de la chere perſonne qu’il avoit perdue. Cependant depuis ce temps là il ne pût touteſfois ſe reſoudre d’avoir jamais aucune confiance au Prince Tydée : qui de luy meſme s’éloigna de la Cour, fit pluſieurs voyages ; & fut enfin demeurer à l’extrémité de la baſſe Phrigie. Je ne vous diray point, Seigneur, que peu de temps apres ſon retour, le Prince Adraſte ſon Frere, qui eſtoit devenu grand, l’eſtant allé viſiter, eut le malheur en eſſayant des Arcs & des Fléches dans ſon Parc, de le tuër, ſans en avoir le deſſein ; car vous ne l’ignorez pas : la juſtice des Dieux qui voyoit ſon crime, que les hommes ne voyoient point, l’en ayant puny par une voye ſi extra ordinaire. Mais je vous diray qu’auſſi toſt apres ſa mort, quelques ennemis que j’ay, m’ayant broüillé aupres du Roy avec beaucoup d’injuſtice, j’ay eſté contraint