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estoient les plus proches de luy, regardoient cét embrazement, & n’osoient regarder Artamene ; qui poussant enfin son cheval sur une petite eminence, où ils le suivirent ; vit & connut si distinctement, que cette Ville qui brusloit, estoit celle-là mesme qu’il pensoit venir surprendre cette nuit, par une intelligence qu’il y avoit, afin d’en tirer sa Princesse, que le Roy d’Assirie y tenoit captive ; que tout d’un coup s’emportant avec une violence extréme ; Quoy injustes Dieux, s’écria t’il, il est donc bien vray que vous avez consenti à la perte de la plus belle Princesse qui fut jamais ? & que dans le mesmne temps que je croyois sa liberté infaillible, vous me faites voir sa perte indubitable ? En disant cela il s’avança encore un peu davantage : & n’estant suivi que de Chrisante & de Feraulas, Helas mes Amis (leur dit il en commençant de galoper, & commandant que tout le suivist) quel pitoyable destin est le mien, & à quel effroyable spectacle m’a t’on amené ? Allons du moins, allons mourir dans les mesmes flames, qui ont fait perir nostre illustre Princesse. Peut-estre (poursuivoit il en luy mesme) que ces flames que je voy, viennent d’achever de reduire en cendre, mon adorable Mandane. Mais que dis-je, peut-estre ? Non, non, ne mettons point nostre malheur en doute, il est desja arrivé ; & les Dieux n’ont pas permis un si grand embrazement pour la sauver. S’ils eussent voulu ne la perdre pas, ils auroient souslevé les vagues de la Mer, pour esteindre ces cruelles flames, & ne l’auroient pas mise en un si grand danger. Mais helas ! s’écrioit il, injuste Rival, n’as tu point songé à ta conservation plustost qu’à la sienne, & n’as tu point causé sa perte par ta lascheté ? Si je voyois ma Princesse (adjoustoit il en se