Page:Scribe - Théâtre, 8.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ALFRED, à Elvina.

Qui ? moi, vous quitter ainsi ! ne plus vous revoir ! puis-je oublier jamais tant de générosité, tant de courage ! non, belle Elvina, je jure de vous consacrer mon existence.

ELVINA.

C’est trop, beaucoup trop pour un simple service. Mais éloignez-vous, je vous en supplie. Tout à l’heure, quand il fallait vous délivrer, rien n’aurait pu m’effrayer, et maintenant je ne sais pourquoi je tremble malgré moi. Partez, rejoignez votre régiment ; vous allez à la guerre, vous allez vous battre, vous êtes bien heureux ! servez bien votre prince, votre patrie, et, au milieu de vos succès, pensez quelquefois à ceux à qui vous les devez, c’est tout ce que je vous demande.

(Le baron paraît dans Le fond, les écoute et se rapproche de la grille de son jardin.)
ALFRED.

Ah ! je suis trop coupable ; et, puisqu’il faut vous l’avouer, apprenez que mon esclavage était loin d’être rigoureux, et que, si j’ai cherché à exciter votre pitié, c’était moins pour fuir ma prison, que pour me rapprocher de vous.

ELVINA.

N’importe, partez. (Roulement de tambour dans le château.) Je vous l’ai dit, vous vous perdez.

FRANCK.

Mille bombes ! on donne l’alarme. (Au moment où Alfred, Franck et Elvina veulent s’éloigner, des soldats paraissent dans le fond.)