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Je te reconnais bien : je vas te crever ton homme ! »

La femme tomba en arrière, les yeux blancs. Ses bras raidis se collèrent aux hanches, son cou gonfla ; et elle battait alternativement le sol de ses deux tempes.

Le gars « moelleux » avait repris sa parade. Mais l’homme au loup attaquait avec fureur. Les fers heurtés tintaient.

Et le carrier maigre criait : C’est le trou sanguin ici. Tu y passeras. A toi ou à moi, il faut qu’on y cloue le chêne. T’es venu pour acheter ma tête, avec ta poule. Tu entends, cette femme-là, elle est à moi, à moi seul. Je veux l’emplâtrer après que je t’aurai tombé. Je l’habillerai de noir. »

Et le gars à la femme disait, parmi les ahans du pic : « Grand cadavre, viens donc que je te défonce. Viens la prendre, ma femme, vilain masque. T’es trop vioque pour me ceinturer ! »

Comme il l’appelait « vieux, » son pic se ficha dans le crâne de l’homme maigre. Le fer grinça sur la toile du loup, qui glissa et tomba. Le carrier s’abattit en arrière, son grand nez au vent, ses moustaches grises frissonnantes. Sur le calot noir, une tache rouge s’agrandissait, suintant par le trou du front.

Tous les travailleurs crièrent : « Holà ! »

La femme se roula vers le bruit, et, rampante, vint regarder l’homme démasqué. Quand elle eut vu le