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sophie ou se mettre à sa place. Ce à quoi chacun peut parvenir sans posséder la faculté de formuler sa pensée au dehors, c’est cette harmonie avec soi-même, qui devient une beauté intérieure. Mais représenter celle-ci objectivement, soit dans la science, soit dans l’art, c’est là une capacité très-différente de cette génialité purement subjective. Ceux, par conséquent, qui prennent une tendance louable en soi vers cette harmonie, ou bien simplement son besoin vivement senti, pour la faculté de la manifester extérieurement, ne feront qu’exprimer une aspiration à la poésie et à la philosophie, sans la condition supérieure pour les posséder ; ils ne pourront que s’abandonner au vague dans l’une et dans l’autre, et dans la philosophie, en particulier, décrier le système qu’ils sont également incapables de faire et de comprendre, même sous une forme symbolique.

Ainsi donc, la poésie, aussi, et la philosophie qu’une autre espèce de dilettantisme oppose l’une à l’autre, se ressembleraient en ce point : que pour toutes deux il faut avoir du monde une connaissance originelle, innée. Le plus grand nombre, en effet, en abordant l’art, se regardent comme suffisamment équipés et se croient capables d’exprimer ses idées éternelles, quand ils ont étudié le monde dans les salons. Et encore, ce sont les meilleurs, si on les compare à ceux qui, sans la moindre expérience de la vie, avec une simplicité d’enfant, font de pitoyables vers. L’empirisme do-