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ΦΡΥΚΤΟΣ.
(Mémoires de la Société de Linguistique, VΙΙ, p. 77. — 1892.)

Φρύγω, qui signifie griller, rôtir et dessécher, n’explique point φρυκτός «feux d’alarme, signal convenu donné au moyen de feux», que nous croyons en effet complètement indépendant de ce verbe, et proche parent du germanique *berχta- (clarus), got. baírhts, v. haut-ail. ber(a)ht. L’υ grec suppose que la gutturale était vélaire, ce qui est confirmé par le védique bhargas «éclat, splendeur», Bhrgavas «les Bhrigu inventeurs du feu»[1]. On peut poser *φροk2τός ou *φοk2τός; dans les deux cas nous admettons pour l’υ la quantité brève, contrairement à celle qui est connue dans φρύγω.

  1. Il faut distinguer cette racine bherg2- de la racine ’bhleg1- (φλέγω; fulgeo, moy. haut-all. blecken «fulgurare» = *blakjan, skr. bhrāģati, avec g1, comme l’enseigne véd. bhrāṭ, racine dont la forme vraie est d’ailleurs probablement bhelag1-, vu le -- de flā{g)men indiquant ļ long et l’a de flagro, flamma (qui toutefois est bref): ainsi s’explique skr. bhrāģ-, valant «bhariģ-», comme drāgh(īyān) vaut «darigh», gr. ἐν-δελεχής.
    Outre ’bherg2- et ’bhelag1-, il existe une troisième racine: bhrek2- dans le gotique brahw «coup d’oeil», moy. haut-all. brehen «luire» (all. mod. der Tag bricht an), lit. brḗkβta «le jour point», ce dernier avec le même ē letto-slave que dans sēd- «sedere» en regard de sĕd- primitif.