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nasales sonantes des thèmes nominaux.

puisqu’on a, de la rac. kai : ći-nómi, de la rac. dhars : dhr̥š-ṇómi et non pas : « će-nomi, dharš-ṇómi[1] ».

La classe des inchoatifs ajoute -ska à la racine privée d’a : skr. yú-ććhati de yo, uććhati de vas. Il est clair par conséquent que yá-cchati de yam, gá-ććhati de gam ont la nasale sonante, et il n’y a pas de raison de croire que le grec βά-σκω soit formé différemment, bien qu’il puisse venir de la racine sœur βᾱ.

b. formations nominales.

Le suffixe -tá (cf. page 15) donne les thèmes suivants :

de tan (ten) : skr. ta-tá = gr. τα-τός = lat. ten-tus
de gam (gem) : skr. ga-tá = gr. βα-τός[2] = lat. ven-tus
de man (men) : skr. ma-tá = gr. μα-τος[3] = lat. mentus²
de ghan (ghen) : skr. ha-tá = gr. φα-τός[4]
de ram (rem) : skr. ra-tá = gr. ἐρα-τός (= lat. lentus ?)

Ces formes indiennes auxquelles il faut ajouter yatá de yam, natá de nam, kšatá de kšan, et qui se reproduisent dans le zend et l’ancien perse (zd. gata « parti », a. p. ǵata « tué » etc.) appartiendraient suivant Schleicher, Beiträge II 92 seq., à des racines en , et l’auteur s’en sert pour démontrer la théorie qu’on connaît ; mais comment se ferait-il que ce fussent précisément là les seuls cas d’un a sanskrit terminant une racine et que dans tous les exemples où la nasale n’est pas en jeu, on trouve i ou ī dans les mêmes participes : sthitá, pītá ? On peut dire tout au contraire que cet a porte en lui-même la preuve de son origine nasale.

Les thèmes en -ti (cf. page 16) sont tout semblables aux précédents : skr. tati = gr. τάσις, cf. lat. -tentio ; kšati (de kšan) a pour parallèle grec l’homérique ἀνδρo-κτασίη (de κτεν). Le skr. gáti, le gr. βάσις et le got. (ga-)qumþ(i)s se réunissent de même dans l’indo-européen gm̥-ti. Le got. (ga-)mund(i)s répond au véd. mati (skr. classique máti), au lat. men(ti)s[5].

  1. Les formes comme δείκνυμι, ζεύγνυμι sont des innovations du grec.
  2. βατός pourrait aussi appartenir à la racine βᾱ qui a donné ἔβην ; les deux formes devaient nécessairement se confondre en grec. En revanche le skr. gatá ne saurait dériver de .
  3. Forme conservée dans le mot αὐτόματος, suivant l’étymologie la plus probable. – -mentus se trouve dans commentus.
  4. L’identification du skr. han et du grec *φεν sera justifiée plus bas.
  5. Les formes latines n’inspirent pas une confiance absolue, en ce sens qu’elles peuvent tout aussi bien s’être formées postérieurement comme le gr.