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nasales sonantes de l’aoriste non-thématique.

L’aoriste thématique redoublé ne fournit aucun exemple grec. En sanskrit on peut citer le védique ća-krad-a-t de krand[1].

L’aoriste sans voyelle thématique qui coïncide pour la forme avec l’imparfait de la 2me classe verbale[2] n’a pas été mentionné plus haut à propos des liquides, parce qu’il n’offrait aucun cas de en Europe. — Le singulier de l’actif conserve l’a (e). Le reste de l’actif ainsi que tout le moyen l’expulsent ; on a donc en sanskrit :

 1º Racines de la forme A (page 9) :
çro : á-çrav-[a]m ; á-çrot çrutám
var : á-var(-s) á-vr̥-ta
et avec nasale sonante dans la forme faible :
gam : á-gan(-t) ga-tám
 2º Racines de la forme B[3] :
doh : á-dhok-(t) á-duh-ran
varǵ : vârk(-s) á-vr̥k-ta

M. Brugmann me fait part d’une explication très ingénieuse des aoristes grecs comme ἔχευα, ἔσσευα qui jusqu’alors avaient résisté à toute analyse. Ce sont les formes de l’actif correspondant aux aoristes moyens comme ἐχύμην, ἐσσύμην. La flexion primitive était : ἔχευα (pour ἔχευ), *ἔχευς, *ἔχευ(τ) ; — pluriel *ἔχυμεν etc. ; — moyen ἐχύμεν. Comme au parfait, l’α de la première personne ἔχευα s’est propagé par tout l’actif, et l’ancien pluriel à syllabe radicale faible s’est retiré devant des formes forgées sur le modèle du singulier (ἐχεύαμεν). Cet *ἔ-χυ-μεν qui n’existe plus et qui est à ἔχευα ce qu’en sanskrit *á-çru-ma est à á-çrav-am a son analogue parfait, avec nasale sonante, dans la forme ἔ-κτᾰ-μεν (rac. κτεν) : seulement, dans ce dernier aoriste, c’est le singulier qui a subi des changements sous l’influence du pluriel : *ἔ-κτεν-α, *ἔ-κτεν(-τ) ont été remplacés par ἔκταν, ἔκτᾰ. — Dans κτά-μεναι, κτά-σθαι, κτά-μενος, ἀπ-έ-κτα-το l’α doit être sorti directement de la sonante. — M. Cur-

    véritable qualité de l’alpha d’ἔπαθον, et cela à cause du latin patior, sur lequel nous reviendrons plus bas. Mais ἔπαθον se trouve être le seul aoriste thématique où l’on puisse supposer une nasale sonante, et, si on le récusait, il suffirait de renvoyer aux exemples qui suivent.

  1. Toujours en supposant que la nasale est radicale.
  2. Les formes qui ont la « vriddhi » comme áçvait, ávāṭ sont entièrement différentes. Il faut y voir, avec M. Whitney, des aoristes sigmatiques.
  3. Les racines de cette forme contenant une nasale ne paraissent pas fournir d’exemple.