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284 DE l'emploi du génitif absolu en sanscrit.

Le richi, confiant dans la puissance de sa digestion, mange Vâtâpi sans s'inquiéter de l'attitude d'Ilvala, qui l'observe et qui va donner à son frère le signal convenu. Ilvalam paçyantam anâdrtya en style de commentateur. Au vers I 67, 16, c'est la calme assu- rance de Râma que le poète veut mettre en relief:

paçyatàm nrsahasrànàm bahûnâm, Raghunandanah ârôpayat sa dharmâtmâ salilam iva tad âhanu^.

Le commentaire de Râmânuja dit, avec raison, je crois, à cet endroit: paçyatàm, anâdarê saçtM.

D'autres fois c'est une indifférence affectée:

Indra, se proposant d'éclairer un muni sur ses véritables devoirs, prend la forme d'un brahmane et se met, en sa présence, à jeter des cailloux dans le Gange (Kath. 40, 16).

âgatya ca sa Gangâyâs tatâc éiksêpa vârini uddhrtyoddhrtya sikatâli paçyatas tasya sôrntini. tad drstvâ miiktamaunas taiîi Tapôdattah sa prstavân: «açrântah kiin idaih, brahman, karôsi?T> 'ti sakautukah.

Le génitif absolu peint l'apparente indifférence d'Indra, qui feint d'ignorer la présence du muni, alors qu'il n'a d'autre but que d'éveiller sa curiosité.

Semblablement Kath. 16, 33, l'exclamation du vratifi veut paraître spontanée:

pravistô jâtu bhiksârtham êkasya banijô grhê

sa dadarça çubhâih kanyâih bhiksâm âdâya nirgatâm.

drstvâ câdbhutarûpâih tâih sa kâniavaçagah çathah

<ihâ hâ kastamh iti smâha, banijas tasya çrnvata^i,

grhîtabhiksaç éa tatô jagâma nilayaih nijam.

tatas tain sa banig gatvâ rahajf, papracéha vismayât:

<ikitn adyaitad akasmât tvam maunaffi tyaktvôktuvân?» iti.

Certains cas que je vais citer offrent un point d'attache avec les exemples — dépourvus de tout anddara — dont se compose le groupe A (p. 278). Si ce rapprochement est légitime, comme je le crois, la distinction d'un groupe A n'aurait de raison d'être qu'au point de vue pratique.

On va voir, en effet, que le génitif absolu d'anâdara sert fré- quemment à l'expression d'un contraste, ce qui s'explique fort aisé- ment. Le fait énoncé dans le génitif absolu est frappé d'anâdara, c'est-à-dire qu'il est écarté, infirmé, démonti par le fait suivant, avec lequel il fait antithèse. Or, de cet emploi à celui que nous présente le groupe A, il n'y a qu'une question de degré.

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