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REMARQUES SUR LA MÉTATHÈSE. THÉORIE DE BRUGMANN. 253

qu'on observe entre autres dans fc, r-ai» (skr. çré) «incliner», cf. ^•, a, r (skr. çârman); sr-a^u (skr. sro) «couler», cf. sa^r. Mais çre et sro ont leurs formes faibles çri et sru. Aussi ne pouvons-nous croire à cette propriété extraordinaire de l'élément «, que M. Brugmann dit exempt d'affaiblissement. Cette hypothèse hardie repose, si nous ne nous trompons, sur le concours de plusieurs faits accidentels qui, en effet, font illusion, mais, considérés de près, se réduisent à peu de chose.

Premièrement certains présents grecs comme à.ï\n\ gardent partout la longue, ce qui s'explique facilement par l'extension analogique. En sanskrit tous les présents en à de la 2e classe offrent la même anomalie (p. 138). Il est clair dès lors que des comparaisons telles que âr]|Li€ç : vâmâs ne prouvent rien.

En second lieu les racines sanskrites en -rd,, -nâ, -ma, gardent Va long dans les temps généraux faibles. Ainsi on a sthitâ, mais snâtâ. Nous avons cru pouvoir donner à la p. 239 la raison de ce fait, qui est de date récente.

Restent les formes grecques comme xpqTÔç, TiaqTÔç. Mais ici la présence de l'élément à étant elle-même à démontrer, on n'en saurait rien conclure à l'égard des propriétés de cet -â.

En ce qui concerne plus spécialement le grec, nous devons présenter les objections suivantes.

1. Les formes helléniques demandent à être soigneusement distinguées, dans leur analyse, des formes indiennes telles que trâtà, snâtâ. Pour ces der- nières la théorie de la métathèse peut être considérée comme réfutée. Elles sont accompagnées dans la règle de toute une famille de mots qui met en évi- dence la véritable forme de leur racine: ainsi t^'àtâ se joint à trâti, trâyati, tfàtâr etc.; nulle part on ne voit tar^. Au contraire, en grec, les groupes comme Tpti-, Tiarj-, sont inséparables des groupes xep-, xe^- (xepe-, xeiua-), et c'est visiblement dans les formes faibles qu'ils s'y substituent.

2. On n'attribuera pas au hasard le fait que les groupes comme xpr)-, T|nri-, Tvri-, lorsqu'ils ne forment jms des racines indépendantes du genre de pLvx], viennent régulièrement de racines appartenant à la classe que nous nommons ud&ttâs.

3. Que l'on passe même sur celte coïncidence, je dis que, étant donnée par exemple la racine udâflà ga^n^ et l'élément â, leur somme pourrait produire ffnn-à (gr. «yavri»), mais jamais ^n-ô (gr. ^vri)*. Il suffit de renvoyer aux pages 240 seq.

Nous reconnaissons aux groupes «métathétiques» trois carac- tères principaux:

1° lis montrent une préférence très marquée pour les formations qui veulent la racine faible,

2" Ils n'apparaissent que dans les racines iidattâs.

3° La couleur de leur voyelle est donnée par celle que choisit le ^ final de la racine udatta:

��1. Sur manati et dhamati à côté de mnâ et dhmâ v. p. 242.

2. Grassmann commet la même erreur, quand il voit dans les racines prâ et çrà des «amplifications de pur et çir». On aurait alors, non prâ, çrâ, mais purâ, çirà.

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