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liquides sonantes de l’aoriste thématique redoublé.

Aoriste thématique redoublé. Il n’est pas certain que les aoristes causatifs du sanskrit soient immédiatement comparables aux aoristes grecs redoublés. Mais il existe d’autres aoristes indiens, moins nombreux, qui coïncident exactement avec les formes grecques : ici encore l’a (e) est invariablement expulsé.

Racines des formes A et C :

skr. sać : á-sa-çć-a-t[1] gr. σεπ : ἑ-σπ-έ-σθαι
pat : á-pa-pt-a-t κελ : ἐ-κέ-κλ-ε-το
ϕεν : ἔ-πε-ϕν-ον
τεμ : ἔ-τε-τμ-ον

Racines de la forme B, avec i, u pour coefficient sonantique :

skr. tveš : á-ti-tviš-a-nta gr. πειθ : πε-πιϑ-έ-σθαι
πευθ : πε-πυϑ-έ-σθαι

Et enfin avec une liquide pour coefficient sonantique :

skr. darh : á-da-dr̥h-a-nta gr. τερπ : τε-τάρπ-ε-το

M. Delbrück range une partie de ces formes indiennes dans le plus-que-parfait ; mais si l’on peut accéder sans réserves à sa manière de voir pour les formes sans voyelle thématique comme aģabhartana, on n’en sera que plus enclin à placer les premières sous la rubrique aoriste.

Parfait. Le parfait indo-européen affaiblissait la racine au pluriel et au duel de l’actif, et dans tout le moyen. Voy. en particulier Brugmann, Stud. IX 314. Ce mode de formation s’est conservé intact dans les langues ariennes.

Racines des formes A et C :

skr. sar : sa-sr-ús pat : pa-pt-ús

Devant les suffixes commençant par une consonne, certaines racines en r n’admettent pas l’i de liaison, et l’on a alors un comme dans ća-kr̥-má. Ce même i de liaison permet, chez les racines de la classe C, des formes telles que pa-pt-imá[2].

  1. On dira qu’ásaçćat est imparfait (présent sáçćati) ; sans doute, mais il n’y a pas de limite fixe entre les deux temps. Les aoristes redoublés sont les imparfaits d’une classe verbale que la grammaire hindoue a oubliée et dans laquelle rentreraient, avec sáçćati, le skr. sī́dati, le part. píbdamāna, le gr. πίπτω, γίγνομαι, μίμνω, μέμβλεται etc.
  2. M. Brugmann (Studien IX 386) éprouve une certaine hésitation à attribuer aux périodes les plus anciennes des formes comme paptimá, et croit plutôt qu’elles doivent le jour à l’analogie de ća-kr- etc. Au fond la question reviendrait à cette autre, de savoir si la voyelle de liaison existait déjà dans la langue mère, auquel cas pat faisait nécessairement pa-pt- au parfait pluriel. Or lu des formes germaniques (bundum, bunduts) s’accorderait bien avec cette