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154 LA PERMUTATION a : Ô EN GERMANIQUE.

Notre hypothèse sur cette faculté d'allonger la voyelle est connue par ce qui précède. Il sera permis de renvoyer le lecteur qui voudra apprécier jusqu'à quel point la propriété de l'allongement est in- hérente aux racines contenant ^ ou o au travail déjà cité de M. Fick qui traite de l'a long européen (Beitr. de Bezzenb. II 193 seq.)- Du reste nous ne nous sentons point en état de dire dans chaque cas pourquoi l'on trouve une brève on une longue, comme nous avons cru en effet pouvoir le faire pour les formations relativement très transparentes qui ont été analysées plus haut. Les remarques qu'il nous reste à faire ne porteront donc point sur le détail.

Les matériaux relatifs à la permutation a : a et ô : o dans le latin se trouvent réunis chez Corssen, Ausspr. V 391 seq. En voici quelques exemples: com-pâges:pago; âceriades; ind-âgare : ago; sâgio: sagax; con-tâgio :tagax\ lâbor ilabare. L'o de prae-co venant de cano serait-il un exemple de Â2'?

En grec on peut ajouter à la liste de M. Fick et aux exemples donnés plus haut: axoçriâxH; ibôéiu reiv-ocrî-cpuXXoç; Kujqpôç: kôtttuj; pubduuv : pôôoç; qpoÛYuu : (poHôç (Curtius).

Pour les idiomes du nord l'échange â: a est devenu une sorte d'àblaut quantitatif qui a succédé à Vablaut qualitatif J^ : a^. Uàblaut qualitatif était détruit par la confusion phonique des deux i (p. 131) comme aussi par la perte partielle des formations contenant J^, dont la plus importante est le présent de la 1® classe. En germanique particulièrement l'élimination de ce dernier au profit des formes comme saka a fait naître entre la série a\o et la série e : a {a^ un parallélisme absolument hystérogène. La langue sent la même relation entre sok, sokjan; groha, et les présents correspondants saka; graba, qu'entre vrak, vrakjan, vraka et vrïkan. Mais le vrai rapport serait rendu assez exactement par la fiction suivante: se représenter les racines comme beug ayant perdu le degré de l'e et ne possédant plus que les formes bug et baug^. — Comme le présent n'était pas le seul thème du degré 1, on s'attendrait cependant à trouver la voyelle longue ailleurs que dans les formations qui demandent «2» par exemple- dans les neutres en -as et les comparatifs en -yas. Il n'en est rien: hatis, skapis, batiza, montrent l'a bref. Ces formes paraissent s'être

��1. A la page 11.5 nous nous sommes montré incrédule vis-à-vis des trans- formations d'ablaiit d'une certaine espèce et avec raison, croyons-nous. Mais ici de quoi s'agit-il? Simplement de la suppression d'un des trois termes de Vablaut, suppression provoquée principalement par la perte du présent.

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