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LES FORMES RADICALES TELLES QUE OTUJ- EN REGARD DE OTÔ-. 131

Si fi, lu, ne sont pas des combinaisons de Ye, ces faits nous apparaissent comme une énigme, h'ablaut qui s'effectue au moyen de Yo est par son essence même lié à l'existence d'un e^. Sans a^, point de a^. D'où un a aurait-il reçu le pouvoir de permuter avec le son 0? Il me semble que tout s'éclaircit au contraire si, â étant pour ea et comparable à la diphtongue ei, on ramène ô k oa en l'assimilant à oi.

Il faut supposer de même l'existence d'une ancienne combinaison OgO; seulement elle n'est plus observable pour nous. Par exemple dans biîj-pov, si nous jugeons d'après x^'P*^ de xôi» la syllabe dô se décompose en dog?, tandis que le dô de bi-5uj-|ni représente deç. — Ces différentes combinaisons sont incorporées au schéma donné plus haut. V. aussi p. 137.

Ce n'est que le plus grand hasard qui nous permet de sur- prendre encore les vestiges si significatifs de la permutation â : o. La langue des Hellènes est à cet égard presque l'unique lumière qui nous guide. Et même pour elle, ces précieux monuments ap- partiennent au passé. L'échange vivant entre les deux voyelles a évidemment cessé depuis longtemps.

Le latin n'a point d'exemple assuré de Vahlaut A^:A^. Il n'y a pas lieu de s'en étonner: c'est tout juste si cette langue a gardé quelques débris du grand échange a^ : a^. Mais on peut dire sans crainte de se tromper que Â^ en Italie serait distinct de A^ aussi bien qu'en Grèce.

En germanique au contraire la différence n'est plus possible: A^, comme nous savons, devient ô; A^ de même. L'anglo-saxon grôve^ parf. greôv, serait, restitué sous une forme plus ancienne, grô-ja, ge- gro. Des deux o de ce verbe, le premier répond à l'a du lat. gra- men {A^), l'autre est de même nature que l'uj de Puj-|liôç {A^). Tout ce qui est vrai de Yo germanique l'est aussi de l'a slave et de Yo lituanien. Ces phonèmes — qu'on peut réunir sous le nom d'à du nord, par opposition à Yê de la même région — contiennent encore vi 6t ôgî lesquels, étant confondus même en grec, ne sont donc distingués nulle part l'un de l'autre. Exemple: si. da-jq, da-rûy cf. gr. bi-5uj-|Lii, bûj-pov (5>i et % v. ci-dessus).

Avant de passer au degré affaibli des racines en a nous ouvrons une parenthèse, afin d'envisager sans plus tarder la question des

��1. Sur les cas comme û^uu ôfMoç v. page 97.

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