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Maigre avorton, à qui d’un pain d’orge, pour vivre,
À peine tous les jours il fallait une livre,
Qui te forçait à fuir ? Ce combat amusant
Prolongea le souper qu’il rendit fort plaisant.
Enfin de Coccéïus la troupe se sépare,
Et non sans rire encor d’un défi si bizarre,
Tout droit vers Bénévent nous dirigeons nos pas.
Là, tandis qu’avec zèle apprêtant le repas,
Notre hôte fait rôtir quelques méchantes grives,
La flamme qui s’élève et qui monte aux solives,
Dans des murs recrépits prenant en mille endroits,
Gagne de tous côtés et menace les toits.
Alors vous eussiez vu, par toute la cuisine,
Les maîtres et leurs gens, redoutant la famine,
Courir au feu, l’éteindre et surtout s’occuper
D’arracher au péril les débris du souper.
Nous quittons Bénévent, et bientôt dans la nue
Des monts de l’Apulie, à mes yeux si connue,
Apparaissent de loin les sommets inféconds,
Dont le froid Japix dévore les moissons ;
Et dont nous n’aurions pu nous tirer sans encombre,
Si, non loin de Trivique, un toit humide et sombre,
Où fume en notre honneur un grand feu de bois vert,
Ne nous eût, pour la nuit, assuré le couvert.
À vingt milles de là transportés en voiture,
Nous trouvons pour refuge une bourgade obscure
Dont le nom dans un vers n’entre point aisément,
Mais que l’on peut d’un trait désigner clairement.
L’eau qu’on y boit, n’est pas à donner mais à vendre ;
Pour le pain, il est bon, et si blanc et si tendre