Page:Satires d'Horace et de Perse.djvu/267

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Redoute à tout moment quelque malheur nouveau ?
La vois-tu retirer son enfant du berceau,
Et du doigt du milieu, saintement attentive,
Lui frotter et la bouche et les yeux de salive ?
Oh ! sans doute elle sait par quels charmes puissans
On détourne l’effet des regards malfaisans !
Des deux mains doucement elle le frappe ensuite ;
Et déjà, dans l’espoir dont tout son cœur palpite,
Le frêle rejeton qu’elle tient en ses bras,
Le dispute en richesse aux Crassus, aux Pallas.
Puisse, dit-elle, un roi le souhaiter pour gendre !
Puissent mille beautés à son hymen prétendre !
Qu’il marche, et qu’à l’instant qu’il les aura touchés,
De roses sous ses pas les gazons soient jonchés !
Pour moi, je ne veux pas qu’une aveugle nourrice
Fatigue ainsi du ciel la bonté protectrice.
Non, vînt-elle, grands dieux ! en habits solennels,
Pour mon fils à genoux encenser vos autels,
N’écoutez point les vœux de sa bouche indiscrète.
Vous demandez au ciel une vigueur d’athlète,
Une mâle vieillesse : à la bonne heure ; mais
Ce luxe efféminé, ces festins, ces grands mets,
Quels que soient ici-bas vos nombreux sacrifices,
Permettront-ils aux dieux de vous être propices ?
Vous voulez augmenter votre bien, vos troupeaux,
Et les autels sont teints du sang de vos taureaux !
Mercure, dites-vous, visite mes étables ;
Donne-moi des brebis, des agneaux innombrables.
Eh ! le moyen d’en voir le nombre aller croissant,
Quand pour lui chaque jour vous en immolez cent !