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N’êtes-vous nulle part à souper invité ?
Quel bonheur, dites-vous, que la frugalité ?
Et, comme s’il fallait, s’y prenant de la veille,
Pour vous avoir chez soi, vous traîner par l’oreille,
Vous criez qu’il n’est pas de plus mortel ennui
Que d’aller s’enivrer à la table d’autrui.
Mais que, dans cet instant, un messager fidèle,
De la part de Mécène, à souper vous appelle :
Ma toge ! mes parfums ! holà ! quelqu’un, holà !
Milvius près de vous retenu ce jour là,
À jeun, non sans dépit, en grondant se retire,
Et les propos qu’il tient, nul ne va vous les dire.
Qu’on m’appelle gourmand, je ne m’en défends pas ;
Je me plais à flairer l’odeur d’un bon repas ;
J’aime à boire, à dormir ; mais, répondez, de grâce :
Si je ne fais rien là que mon maître ne fasse,
De quel droit à nos yeux venir sous de grands mots,
Chercher, en m’accusant, à couvrir vos défauts ?
Et si je vous prouvais, par cent raisons diverses,
À vous qui ne m’avez payé que cent serterces,
Que vous ne valez pas mieux que moi !.. Quel courroux !
Allons, un peu de calme, et surtout point de coups :
On doit de Crispinus respecter les adeptes,
Et son portier m’a mis au fait de ses préceptes.
Suis-je un vil adultère, allez-vous dire ? Non ;
Pas plus que je ne suis, moi Dave, un vil fripon,
Lorsque vous me voyez, à mon devoir fidèle,
Passer, sans y toucher, près de votre vaisselle.
Mais ôtez le péril, faites taire les lois,
Et bientôt la nature aura repris ses droits.