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QUARANTE ANS DE THÉATRE

— Ah çà ! est-ce que vous croyez que je vais vous laisser tuer un homme qui m’économise 25 pour 100 sur mes frais.

Le combat a lieu à l’instant même, derrière la maison ; le vibrion est embroché ; tout le monde revient sur la scène pour se réjouir et la cousine du vibrion, et le vieux savant, et le beau-père, et la duchesse, et Gérard. Il n’y a que mistress Clarckson qui ne soit pas contente. Mais bonsoir à l’étrangère et bon voyage !

Et comme le commissaire, qui est entré sur ces entrefaites, prie le vieux savant de constater la mort :

— Avec plaisir, répond-il.

Que voulez-vous ? c’est un vibrion.

Telle est cette pièce bizarre qui tient à la fois de la haute comédie et du grossier mélodrame, mélange inouï de fantaisies extravagantes, de hardiesses étranges, de vulgarités choquantes et de morceaux incomparables ; où deux scènes de maître, celle de la présentation de l’étrangère au premier acte et celle de la discussion avec le yankee au cinquième, se détachent sur un fond d’inventions qui rappellent à la fois Ponson du Terrail et d’Ennery ; où éclatent de toutes parts, à travers un brouillamini de métaphysique subtile, de discussions oiseuses, de récits inutiles ou saugrenus, une foule de mots plaisants et profonds ; où se découvrent, à chaque instant, au milieu d’un fouillis insensé, des coins ravissants de mise en scène habile ou de spirituelle observation ; une comédie sans intérêt et qui amuse d’un bout à l’autre ; mal bâtie, faite de pièces et de morceaux, et qui ne vous lâche pas un seul instant ; un monstre enfin, un monstre informe, mais puissant toujours, et par endroits charmant.

21 février 1876.