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logique, comme sans réserve de pruderie[1]. » C’était bien de la vie que le Député Leveau, comme le furent toutes — ou presque — les pièces qui suivirent : Mariage blanc (1891), Flipote (1893), Les Rois (1898), l’Age difficile, le Pardon (1895), l’Aînée (1898).

Ce n’est point le lieu ici d’étudier en détail chacune de ces pièces, nous voulons nous borner à en indiquer les caractères généraux. Il se peut que Jules Lemaître n’ait point, à proprement parler, le « don de la création dramatique » mais, outre que c’est là un cliché bien suranné, il n’est, en tout cas, point douteux que Jules Lemaître, au théâtre comme ailleurs, possède le don du charme et celui de l’émotion. Le don de l’émotion, à chaque instant il se révèle, à chaque instant il nous frappe dans chacune de ses œuvres, aussi bien dans le Député Leveau et dans l’Age difficile que dans Mariage blanc et dans Les Rois dont le deuxième acte est un des plus poignants qui aient été écrits depuis que le théâtre existe, et dans Révoltée même son œuvre de début.

Quant au don du charme, à chaque scène il se fait jour et il nous captive, dans le cours de son œuvre dramatique tout entière, par la finesse sérieuse et profonde du dialogue, par l’imprévu des réflexions, par la hardiesse des propos, la nouveauté des situations, par le dilettantisme des personnages essentiels et par l’enjouement de leur scepticisme moins

  1. Discours de M. Gréard à la réception de M. J. Lemaître.