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Révoltée, qui fut représentée à l’Odéon. Ce n’est pas sans quelques appréhensions que ses amis voyaient le critique des Débats s’exposer à son tour aux critiques, aux représailles peut-être de maints auteurs pour lesquels ses jugements avaient manqué de tendresse. Il n’en fut rien. Si le succès ne fut pas éclatant, il fut honnête ; si la critique ne fut pas enthousiasmée elle fut suffisamment louangeuse. Francisque Sarcey, après avoir déclaré que l’œuvre était « d’une singulière inexpérience et d’une rare maladresse », reconnaissait qu’elle témoignait « d’un goût rare d’observation vraie et d’un sens singulier de la vie moderne. » Se critiquant lui-même, l’auteur n’hésitait pas dans son feuilleton des Débats à blâmer son quatrième acte. Après avoir analysé son œuvre il concluait : « Vous voyez que ce dernier acte est fort médiocre… maintenant j’en conçois un autre meilleur, et où pourtant André ne mourrait point… mais il est trop tard. »

Le Député Leveau qui fut représenté l’année suivante au Vaudeville marquait plus de sûreté dans le métier dramatique sans que cela veuille dire que J.  Lemaître se montrât obéissant observateur des lois et des conventions scéniques. « Cela n’est pas du théâtre », prononçait Sarcey. — Je m’en moque, répondait Lemaître, si c’est de la vie. »

Et c’est bien de la vie en effet, c’est de la vie transposée, de la vraie vie, « avec ses fièvres latentes et ses éruptions hardies, sans prétention aux mystères de l’analyse psycho-