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LE CHÈVREFEUILLE

guerre le lui disputait et, deux ans plus tard, il ne lui en demeurait rien, rien que le souvenir d’une brusque rupture qu’elle n’acceptait pas, qu’elle n’admettait pas, qu’elle ne commença d’admettre que lorsque je lui eus ramené du front, en 1920, dans le cimetière où elle le voulut, le cadavre de son mari.

Voilà bien comme tout s’enchaînait dans ma pensée douloureuse. En partant pour l’Arc de Triomphe, j’avais, sans m’en rendre compte, emporté, plus intense que tous mes autres regrets et prêt à les dominer malgré moi, le regret de ce merveilleux bonheur anéanti. Là-bas, près de la tombe où gît sous les espèces du Soldat Inconnu l’inexpiable destin de toute une génération massacrée,