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ques années, lorsqu’elle aura pris le voile. »

Sur ces entrefaites, M. de Nives mourut sans avoir révoqué la sentence. Marie montra un violent chagrin, mais résista au conseil des religieuses, qui voulaient qu’elle m’écrivît. Elles lui dirent de ma part que j’étais toute disposée à la reprendre avec moi, si elle faisait la moindre démarche pour m’y faire consentir. Elle repoussa le conseil avec fureur, disant que j’avais fait mourir son père et sa mère, et qu’on la tuerait plutôt que de lui faire mettre le pied dans la maison.

— Est-ce que réellement elle vous accuse ?…

— Elle m’accuse de tous les crimes, n’en doutez pas ! Comment concilier cette haine furieuse et ces outrages avec la dévotion qu’elle manifestait alors ? Pourtant je crus encore à sa vocation religieuse. Il est des êtres terribles et insensés qui ne peuvent trouver d’apaisement que dans la vie mystique.

— Je crois le contraire. La vie mystique exaspère les esprits troublés. N’importe, poursuivez.

— En dépit de sa religion apparente, Marie commençait à éprouver les troubles de la nubilité, et un beau jour on découvrit qu’elle entretenait au dehors une correspondance amoureuse avec un écolier dont on n’a pas su le nom, mais dont l’orthographe était à la hauteur de la sienne.