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BRÉCOURT.

Je dis, mon enfant, que, vous aussi, vous êtes un homme de génie : nous le savons ici, nous qui vous voyons grandir à l’ombre bienfaisante de Molière. Un jour viendra où tous le sauront, si vous voulez.

BARON, inquiet.

Si je le veux ?

BRÉCOURT.

Il dépend de vous d’être tout ou rien. Vous serez tout, si vous vous rappelez que, pour être grand dans un art quelconque, il faut être grand dans les actions et les sentiments de la vie ; vous ne serez rien si la trahison et la lâcheté surmontent votre courage, La mort de votre vertu sera celle de votre talent.

BARON.

Mon Dieu ! expliquez-vous, Brécourt.

BRÉCOURT.

Tu es sur le point de te perdre, Baron ! J’ai vu tes yeux et ta contenance tout à l’heure, à cette place où nous sommes. Je t’ai vu échanger avec Armande un mot qui a subitement changé son attitude et ses résolutions. C’est bien, mais c’est assez ! Il faut vivre à Paris, chez moi. Baron ; travailler à distance pour Molière, ne voir Armande qu’au théâtre, lui parler à peine, n’y penser jamais et ne point la suivre à Auteuil.

BARON, se jetant dans ses bras.

Oui, garde-moi, sauve-moi, mon ami ! Plains-moi… mais tue-moi si je ne t’obéis point !