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passionné, sincère du bien et du mal qui caractérisent leur époque. Sans cela ils ne seraient ni artistes ni poètes.

Mais, en général, dix-neuf fois sur vingt ils ne sont point hommes pratiques et ne peuvent pas l’être.

Pourquoi ? dira-t-on. Je vais le dire et me trouver d’accord avec Proudhon.

C’est que par suite de je ne sais quelle grâce d’état, peut-être par suite de l’espèce de vertige que la flatterie leur a donné (car jamais la vanité littéraire n’a été aussi dangereusement excitée que dans ces derniers temps), ils ont tous les défauts des avocats sans en avoir l’habileté. Ils se croient le centre de toutes les idées et l’expression de tous les sentiments publiés. Ils estiment si haut leur spécialité qu’il ne leur faudrait point parler d’apprendre quelque chose, de l’étudier, d’écouter autrui, et de se rendre à l’opinion générale. Ils ont un orgueil maladif, et forment véritablement une sorte de caste sacerdotale qui se rangera difficilement à l’idée républicaine, au gouvernement de chacun par tous.

Voilà pourquoi presque tous les littérateurs