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Madrid, 3 mai 1871.
Chère amie,

Je suis installé dans la capitale de toutes les Espagnes depuis samedi, et je m’y trouve très bien en vérité. Les bains de soleil que je prends journellement me font un bien infini, tandis que l’accueil qui m’est fait dans les bibliothèques et les dépôts d’archives m’encourage à travailler.

Dimanche, j’ai vu une véritable course de taureaux ; et je dois reconnaître que le spectacle dont on jouit en entrant dans l’arène est quelque chose de splendide. Le nouveau roi[1] et son épouse y étaient. Ils ont été froidement accueillis, et, d’après ce qu’on m’assure, avant peu ils seront obligés de retourner en Italie, pour faire place au duc de Montpensier « Cosas de España ! »

Je n’ai pas encore vu une seule jolie femme, bien que rencontrant à chaque pas des señoras et des señoritas, coiffées de la mantille et jouant de l’éventail. Aussi n’ai-je pas perdu mon cœur jusqu’ici. Peut-être aurai-je plus de chance à Séville, le pays des Andalouses ! Je pars pour Cordoue vendredi prochain, dans la nuit, et serai à Séville lundi, pour n’en repartir que lorsque Paris sera revenu à l’état normal. On me prédit sur les bords du Guadalquivir une chaleur plus que tropicale, mais cela m’est égal : je suis ferré à glace !

Dans une lettre que je viens de recevoir de M. A. de La Tour, je trouve ces mots : « Demandez à madame Sand si jamais elle a reçu un travail de moi sur la vallée de Batuecas, inséré dans la Revue britannique, adressé sous forme de lettre à l’illustre écrivain, et dont

  1. Amédée, fils de Victor Emmanuel.