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de pouvoir dans la nation ne leur court point en aide, ils vont mourir du chagrin que leur causerait une poule dans leur blé ou une oche dans leur luzerne. Mais qui est-ce qui prendra donc enfin un beau jour la défense de la petite propriété contre la grande ! M’est avis que ça serait temps. Et la défense de la non-propriété, c’est-à-dire de la vie des pauvres contre tous les propriétaires petits et grands ? Oh ! pour ça, je ne vois pas qu’on ait envie de ressusciter la parole de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et je crois bien qu’il se passera mille ans avant qu’un maire, un adjoint ou un simple conseiller municipal donne, dans une contestation, la préférence au misérable sur le propriétaire, son confrère et son semblable à lui, officier municipal qui n’est jamais et ne peut jamais être choisi parmi les pauvres, nos pareils à nous qui ne nommons et ne choisissons personne !

J’en étais sur les communaux, pardon excuse si tout ce que j’ai sur le cœur me fait bavarder un peu à tort et à travers. Je vous disais qu’en 93, vous le savez mieux que moi, on nous avait fait là-dessus des lois qui nous débarrassaient si bien des prétentions de nos seigneurs, que nous pensions n’avoir plus rien à craindre. Aussi prîmes-nous bientôt, nous autres pauvres ménageots, l’habitude de regarder comme nôtres ces terres vaines et vagues, comme où les appelait. Nous achetâmes chacun cinq ou six pauvres bêtes, et même moins quand nous ne pouvions pas mieux faire ; et de ce moment-là, comme on paraissait ne vouloir jamais nous tracasser là-dessus, nous fîmes de nos petits en-