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Sur tous les escaliers sont groupées les jolies filles ou les bonnes femmes, qui me regardent avec de bons ou beaux yeux, et qui sourient, attendant que je les prévienne. J’aime cette discrétion ou cette fierté. Je fais les avances : étranger, c’est mon devoir. La réponse est prompte, très-familière, mais vraiment bienveillante.

On parle très-bien ici, encore mieux que dans la vallée Noire, ce qui n’est pas peu dire. Plus nous touchons à la limite de notre langue d’oil, plus le langage s’épure, plus l’accent s’efface. J’aurais cru le contraire, mais c’est ainsi. Ici, point de j’avons, j’allons, etc., à la première personne. Pas plus que chez nous on ne fait cette faute grossière.

On se sert même ici de mots qui sentent la civilisation et qui dépassent le vocabulaire à moi connu du bas Berry. On dit énorme, immense, ce qui paraît singulier dans ces bouches rustiques. Sylvain, notre cocher berrichon, croit qu’on se sert de mots latins et ouvre de grands yeux. Le seul mot patois qui se glisse dans la conversation quelquefois, c’est ie pour elle.